Mode de preuve illicite, pas de licenciement pour faute grave

Publié le 26 Septembre 2019

Le recours par l’employeur à un mode de preuve illicite lui interdit de se prévaloir de la reconnaissance par le salarié des faits fautifs qui lui sont reprochés, il s’agissait en l’occurrence d’un vol, pour le licencier.

Si la solution n’est pas inédite, les circonstances particulières de cette affaire méritent que l’on s’y arrête.

L’employeur, qui exploitait un café restaurant, avait licencié une salariée pour faute grave, au motif qu’il aurait découvert qu’elle avait détourné de l’argent en empochant le prix de consommations qu’elle n’avait pas enregistré en caisse, et qu’elle avait servi gratuitement des consommations à des clients sans y avoir été préalablement autorisée par son employeur.

L’examen des caméras de surveillance qu’il avait installées dans l’établissement lui avait permis cette découverte.

L’employeur avait en outre déposé une plainte pour vol à l’encontre de la salariée, qui s’était terminée par un rappel à la loi (article 41-1 du Code de procédure pénale), étant précisé qu’un rappel à la loi ne constitue pas une condamnation.

L’intéressée avait reconnu les faits incriminés lors de son audition par les gendarmes.

Elle avait néanmoins contesté son licenciement, soutenant que les preuves obtenues par le système de vidéosurveillance installé dans l’entreprise étaient illicites car elle n’avait pas été informée de la mise en place de ce système.

L’article L 1222-4 du Code du travail dispose en effet qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance.

Pour affermir sa position, l’employeur s’appuyait devant la juridiction prud’homale, non seulement sur les faits révélés par la vidéo-surveillance, mais également sur l’aveu auquel la salariée s’était livrée devant les forces de police.

L’argument est rejeté par la Cour d’appel, qui n’accorde à cet aveu extra-judiciaire qu’une valeur probante toute relative.

Il en aurait été autrement s’il s’était agi d’un aveu judiciaire, exprimé dans un cadre judiciaire, qui « fait pleine foi contre celui contre celui qui l’a fait », selon les termes de l’article 1383-2 du Code civil.

La chambre sociale de la Cour de cassation approuve les juges du fond, et énonce que l’employeur avait déposé plainte pour des faits de vols en se fondant sur les images de la vidéosurveillance, et l’audition de la salariée par les services de gendarmerie était consécutive à cette exploitation des images de vidéosurveillance, illicite en raison de l’absence d’information de la salariée de l’existence du système de surveillance, en sorte que le lien existant entre ces deux éléments de preuve, permettait de considérer que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 20 sept. 2018 n° 16-26482).

Cet arrêt est à rapprocher d’une autre décision, où un employeur avait mis en œuvre un stratagème en faisant intervenir deux faux clients afin de confondre une vendeuse en parfumerie à l’égard de laquelle il avait des soupçons, qui n’avait pas enregistré leurs achats.

La salariée avait été licenciée pour faute grave.

Ce licenciement avait été jugé injustifié, l’utilisation par l’employeur d’un stratagème mis en place afin de contrôler à son insu les pratiques de la salariée constituant un procédé déloyal, et partant, un mode de preuve illicite (Cass. Soc. 19 nov. 2014 n° 13-18749).

 

Rédigé par SYNDICAT CGT LOGISTIQUE CARREFOUR SUPPLY CHAIN

Publié dans #DROIT DU TRAVAIL

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